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Confesse Book

67 – Les Echos # La Relève

De retour sur mon île assombrie sous la pluie incessante et froide d’une journée venteuse. Manhattan. J’essaie de rattraper le retard dans mes emails. On me demande ce que je faisais au Journal « Les Echos » dimanche dernier aux côtés de 150 personnalités des affaires et patrons du CAC 40. À vrai dire, je ne sais pas ce que je faisais ? On m’avait proposé, et j’avais accepté, la rédaction de deux petites chroniques, l’une à connotation marketing (Trends spotting) d’environ 1800 signes espaces compris et l’autre plus management – leadership, de 1000 signes maximum dans la rubrique «Business ». Nous avions échangé pas mal d’emails, jusqu’à cette journée de « # la relève ». Une fois sur place j’ai enfin demandé : « Pourquoi donc avoir choisi de m’attribuer la rubrique « Business » ? On m’a répondu que le choix s’était fait au hasard. Le challenge étant de demander aux invités de s’exprimer sur des sujets tirés de l’actualité, pas forcément liés à leur spécificité professionnelle. Certains devaient aborder les sujets chauds issus des événements du jour, d’autres comme moi procédaient d’une réflexion inspirée par des sujets d’ordre plus général.

J’ai écrit deux articles ; le premier parlant de « l’essor de la publicité internet pénétrant l’hyper intimité des tablettes », d’autre part, j’ai voulu mettre en exergue ce paradoxe qui veut qu’aujourd’hui on n’a jamais écouté autant de musique alors que ceux qui la font n’ont jamais eu autant de mal à vivre de leur savoir-faire ! La crise de la musique c’est ça.

C’est un drôle d’exercice pour auteur « libre » que d’écrire dans un cadre limité à un nombre très spécifique de signes.

Beaucoup des invités avaient à côté d’eux un coach qui mettait en forme leur pensée. Etre un patron, champion des discours de motivation à l’oral en comité d’entreprise ou en conseil d’administration, c’est une chose, écrire un article objectif publié dans un canard, c’est autre chose. Moi j’avais écrit tout seul mon papier. Réécrit plutôt dix fois qu’une avant de l’envoyer. Aujourd’hui, il était là, composé. Déjà en case. À peine pus-je changer une virgule. Au moins, je n’avais pas le stress de ceux qui devaient se jeter sur leur clavier pour mettre en forme une info d’urgence.

J’ai serré des mains, échangé des cartes de visite, répondu à quelques interviews. Croisé Daniel Buren, Bertrand Lavier et Jean Nouvel. Et puis Fabius, Mosconi, Anne Hidalgo. Et puis retrouver d’autres amis et connaissances New Yorkaises. J’ai salué la photographe Catherine Isserman, et l’entraîneur de handball Claude Onesta et le roi du caviar Petrossian avec ses moustaches pointues. Mais j’ai surtout rencontré beaucoup de gens que je ne connaissais pas plus qu’ils ne savaient eux qui j’étais.

Je suis comme tous les voyeurs, les espions, j’aime bien vaquer dans les coulisses ou démonter l’objet pour savoir comment il marche… Ainsi en changeant de milieu on apprend à entendre les autres s’exprimer entre deux gorgées de café et un gâteau sec. C’est comme ça qu’on peut se faire une idée, sans la pression des influences extérieures.

J’ai toujours cru qu’il fallait infiltrer le pouvoir pour lui inspirer des pensées nouvelles. Mais plus les années passent, plus je deviens sceptique !! Tout ce système de puissance est terriblement cohérent. Il est fait de relais, et chacun y trouve son intérêt.

Même s’il s’agit d’un château de cartes soutenu par la volonté du Saint-Esprit, néanmoins les bâtisseurs se serrent les coudes et cette construction de profits et pertes en expansion, a atteint des hauteurs si fabuleuses que seul un esprit cosmogonique pourrait le remettre en question.

® CharlElie 20XIV