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Confesse Book

60 – Défibrilateur

Désormais dans les TGVs, une voix (bilingue) vous informe qu’il y a un défibrillateur disponible au bar. Comment ça un défibrillateur ?
À qui donc s’adresse cette annonce ?
Que peuvent faire les simples voyageurs (bilingues) même fébriles, fiévreux ou fibreux avec un défibrillateur ? Pas un stéthoscope basique pour ausculter les sons du corps, pas un sphygmomanomètre à colonne de mercure pour prendre la tension, pas une recharge pour pace-maker déficient, non, un défibrillateur.
Si je ne m’abuse, un défibrillateur peut servir à faire redémarer un cœur en panne. Suis-je monté dans un train de cardio-pulmo-vascularisés ? Pourquoi pas un scanner en cas d’AVC, ou une baignoire à ultra sons pour colique néphrétique ? Pourquoi pas un échographe pour femmes enceintes ? Ou un masque à oxygène au cas où un mec s’étouffe envahi par une vague d’angoisse ?

Un défibrillateur au bar, c’est un peu comme si on me disait qu’il y a un transfo, ou un compresseur, un sidérateur herzien à baïonnettes, un IRM ou un appareil à dialyse accessible à côté du percolateur, des sandwiches triangulaires, ou des packets of chips…
Et pourquoi pas une roulette de dentiste, ou des ciseaux de coiffeur, un fer à repasser ou un projecteur diapo, un aspirateur à pellicules, un four à faïence, un vibromasseur bi-turbines, un tractopelle, une grue ou une machine à coudre multi fonctions sont eux aussi à disposition … ?
Ce machin machine est quand même un appareil très spécifique dont il faut j’imagine avoir lu la notice avant de s’en servir. Je regarde mon voisin en costume cravate, que ferait-il s’il savait qu’un radar électronique, un condensateur à particules et un kit de débosselage sont disponibles dans la caisse à outil voiture 12?
Un peu perplexe, je demande au contrôleur:
– Ça sert à qui ce défibrillateur ?
– Hein ?
– En quoi avons-nous « tous » besoin de savoir qu’il y a un défibrillateur disponible au bar ? J’ai l’impression que ça concerne surtout les médecins…
– Ben oui, plutôt…
– Mais est-ce que moi, personna lambda, je pourrais aller au bar et demander un petit coup de défibrillateur pour me relancer si j’me sens un peu mou ?…
Un peu interdit il me répond que :
– Non !
– Mais dites-moi, y a souvent des mecs qui profitent de ce service supplémentaire que vous semblez offrir ?
Il me répond que « Non, depuis deux ans, jamais personne est « heureusement » venu utiliser ce défibrillateur… Mais on ne sait jamais, ajoute-t il.
– Je comprends oui, c’est par précaution… au cas où… Si quelqu’un venait à avoir une crise cardiaque, et que lucide il fasse appel à un opérateur sachant se servir d’un défibrillateur, dans ce cas-là, au lieu de chercher vainement sous les sièges, il sait qu’on peut trouver direct le défibrillateur au bar, s’il n’y a pas la queue.
Entre nous, pour moi ça ressemble à la chauve-souris du sketch de JMBigard cette histoire.
– Est-ce que vous faites vérifier régulièrement ledit défibrillateur ?
– Comment ça? Non, pas vraiment, je l’ai jamais vu fonctionner…
– Alors t’imagines le scénario: enfin, au bout de trois ans, y a une vraie crise cardiaque dans le train, par chance un médecin assiste à la scène, il prend la chose en main, il fonce au bar, il sait qu’il y a un défibrillateur et là, damned, le défibrillateur marche pas…

Mais bon, il y a quand même un défibrillateur au bar !

® CharlElie – Sept 2014