J’ai pris un train tôt pour être à temps au crématorium du père Lachaise afin d’assister aux obsèques et hommages rendus au peintre Gérard Fromanger décédé le 18 Juin. Je n’étais pas de ses intimes, mais je l’avais rencontré à plusieurs occasions. Il avait fait notamment partie des peintres de la figuration narrative et du groupe des Malassis auquel avait appartenu Michel Parré, l’un de mes profs aux Beaux-Arts qui me l’avait présenté.
Bernard Blistène, Régis Debray, Christian Bernard, Lionel Jospin ainsi que la ministre de la culture s’appliquèrent à relater sa mémoire comme un exercice de style élégant entre gens de mots. Chacun célébra à sa manière celui qui les avait inspirés. Le discours le plus émouvant étant celui de son ami Serge July qui raconta dans le détail les derniers instants dramatiques de la vie de l’artiste.
L’endroit était archi plein. Sur l’écran installé à l’extérieur, sous la belle lumière qui nous éclairait ce matin-là, j’ai suivi cela à côté d’Ernest Pignon Ernest et d’une cinquantaine d’autres personnes, parmi lesquels j’identifiai Harry Bellet (critique d’art) et Vicky Colombet (que j’avais rencontrée à New York). Après avoir salué Jack Lang, je me dirigeai vers la sortie du cimetière quand je reconnus Elisabeth Badinter. Je m’approchais pour lui présenter mes respects quand la personne qui l’accompagnait s’interposa pour m’écarter. Je me présentai alors et Élisabeth Badinte leva vers moi un regard malin et tout en me remerciant, elle fit savoir à ladite personne qu’elle était au courant (même) de mon retour de New York…
J’ai rejoint ensuite le slameur Sébastien avec qui nous avons enregistré « l’éveil du Val » qui sortira à la rentrée et passé le reste de l’aprèmidi à écrire. Le soir je suis allé diner chez mes amis Poindron-Buffet chez qui j’ai rencontré le poète Haïtien Benoît d’Afrique, le qui vient de sortir « Débridé » une revue poétique plutôt bien faite.
Le lendemain, je me suis mis au labeur à la table des signatures pour « New York Memories », dans le cadre d’un salon du livre qui se tenait place de Fontenoy derrière la tour Eiffel. L’accueil attentionné et convivial, mais convenons que le titre du salon « Des livres des stars » avait quelque chose d’un peu flagorneur, racoleur. Du coup, le public nonchalant semblait plus intéressé par les selfies et autographes que par la littérature en tant que telle. De plus les barrières de sécurité (anticovid…) imposées par la préfecture de police, donnaient le sentiment d’être parqués dans un enclos VIPs . Michel Drucker, Michel Onfray, Yann Queffelec, Éric Naulleau, j’ai aussi salué Moundir, mon voisin de chaise l’ex Koh-lantiste et joueur de Poker. Échanger quelques mots avec Rachida Dati, instigatrice de l’événement et maire du 7 arrondissement, et partager le micro sur scène avec Harry Roselmack – non pas venu pour présenter les News mais un livre de « nouvelles »…- Dans les enceintes acoustiques la qualité du son était garantie par le savoir-faire de Philippe Guichard, mon complice, qui assure depuis une vingtaine d’années la sonorisation de mes spectacles et que je vais d’ailleurs retrouver pour le prochain concert avec le groupe à Vaut-sur-mer samedi prochain 3 juillet 2021…
Et puis je me suis esquivé… Mon scooter à la main, j’ai traversé le défilé de la marche des Fiertés (anciennement Gay Pride) célébrant les différences LGBT multicolores de l’Arc-en-Ciel à faire blêmir de rage les supporters de foot Hongrois…
Mon copain Alex m’a rejoint. On avait prévu d’aller manger un plat de ces délicieuses pâtes que savait si bien préparer le restaurateur Da Giacomo, rue du Château Landon, mais en arrivant, mauvais signe, le rideau était à moitié baissé. Pourtant il était là. Il nous a fait signe de rentrer et nous fait asseoir à sa table sur laquelle trônaient deux tartelettes aux fraises qu’il s’apprêtait à partager avec l’autre personne présente, un vieil ingénieur des télécommunications spatiales Russe. La salle à manger en désordre, ça ne laissait rien prévaloir de bon. « Ne me dis pas que t’as vendu…
– Si… à mon voisin, mais tu verras, il est très sympathique. Écoute, j’ai 75ans, c’est plus pour moi, je suis épuisé. Ce qui vient de se passer depuis un an, m’a fait prendre conscience, qu’il faut savoir tourner la page… »
On a bu des Prosecco Bolla, et on s’est juré qu’on continuerait à se voir, pourtant au fond de moi je ressentais comme la tristesse d’avoir assisté ce qui ressemblait à la dernière vague d’une vie sur une berge du lac de Côme d’où Giacomo était originaire.
Alex qui rencontrait cet personnage un peu fantasque pour la première fois, l’avait tout de suite cerné, il m’a dit : en fait c’était un homme pudique, caché derrière une certaine exubérance.
C’était la fin d’un « lieu de quartier », un endroit atypique pour les fins gourmets, sûr qu’il sera bientôt remplacé par quelque chose de nouveau, bien intentionné peut-être mais qui ressemble à tant d’autres… Parce qu’il était unique.
Et comme aimait à le dire Gérard Fromanger : l’Art c’est ce qui donne à la vie encore plus de sens que l’Art.
CharlElie COUTURE
27 Juin 2021