Dénoncé, trahi pendant la guerre, mon père avait des raisons de mettre en doute la parole des autres, mais j’avais vu aussi comme il s’était retrouvé souvent isolé en lui-même. À son inverse, je me suis efforcé d’accorder une sorte d’apriori favorable à ceux que je rencontre. Un principe de la confiance lucide que j’ai tenté de transmettre à mes enfants. Une clairvoyance. De même je fais confiance aux gens avec lesquels je travaille, (musiciens ou équipes techniques, chacun d’entre eux se sait responsable de la tâche qu’il doit accomplir).
De même je fais confiance aux médecins qui m’aident à me soigner quand je suis malade. (no comment)
Faire confiance, c’est se rendre disponible pour le meilleur.
Je ne comprends pas le monde qui refuse la confiance, celui qui s’embourbe dans le principe de précaution, je ne comprends pas l’obsession du pire.
Nous sommes entourés d’anges et de démons. Les anges assurent la liaison entre l’idéal divin et le pragmatisme terrestre. Les anges n’ont pas d’ailes, ils peuvent être n’importe qui. On peut tous être l’ange d’autrui, d’une manière ou une autre l’amener à se transcender. Les démons n’ont pas de cornes, ils ne sont pas plus reconnaissables, mais ils nous attirent vers le côté sombre de nous-mêmes qui nous fait voir l’enfer.
Ceux qui sont habitués à la discipline, à l’organisation des choses imposée avec rigueur et sévérité, ceux-là ne comprennent pas le principe de la confiance qui leur paraît naïf, hippie, bizounours. Je déteste le monde qui construit des murs ou invente des gestes barrières. Je n’ai rien contre les bâtisseurs, mais je déteste les geôliers. Quand on dit que ça craint, moi je crains ceux qui craignent. Les paranoïaques sont habités par une angoisse inconséquente, incontrôlable, irrépressible qui les rend invivables. Je crains ceux qui voient le mal partout. Persuadés qu’ils n’ont pas tord, ils n’ont pas raison non plus : tout est question de pourcentage.
Je crains les ignorants fanatiques, ceux qui manquent de recul et de relief dans leurs analyses, mais je crains surtout les imbéciles qui ne tirent mais aucun prestige ni satisfaction du mal qu’ils déclenchent et des souffrances qu’ils font subir sans même s’en apercevoir.
Mais la confiance est aussi fragile. C’est cette fragilité qui la rend magique, qui lui donne toute sa force d’attraction, sa puissance invisible. Quand elle s’est brisée difficile de recoller les morceaux. Quand la confiance est rompue, les couples se séparent. Ceux qui ne méritaient pas/plus ma confiance je les ai écartés, oubliés, effacés de mon carnet d’adresse, dégagés, supprimés de mon écran radar.
Pour qu’il soit valable un ordre doit être simple, une loi doit être comprise. Plus un règlement semble injustifié plus il tend à être détourné, perverti, esquivé. Alors pour s’imposer l’autorité choisit la répression. Mais les châtiments, les blâmes, les reproches, les punitions, les amendes, prunes ou PV n’amènent que la peine qui laisse de profondes cicatrices.
C’est la confiance qui incite l’Homme à devenir meilleur. C’est la confiance qui fait bouger les murs, c’est elle déplace les montages et fait reculer les interdits, c’est elle qui courbe les lignes droites ou donne le je-ne-sais-quoi de relâchement qui permet de gagner un match. L’autorité dirigiste et les contraintes idiotes avilissent les peuples en les entraînant dans la tristesse, c’est la confiance et la dignité qui rend les gens heureux leur donne foi en l’avenir.
CharlElie COUTURE
30 septembre 2020