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Confesse Book

410 – Les bons conseils

Les bons conseils n’ont malheureusement aucun sens.
Je quittais une amie l’autre soir assez tard, il est vrai, quand elle me dit en me faisant avec bienveillance un petit signe de la main: « Fais attention à toi ! » Que voulait-elle dire par là? Est-ce que d’habitude je ne fais pas attention? Avant d’arriver là, personne ne m’avait suggéré de « faire attention » et pourtant j’y étais. Soit je rentrais chez moi, soit je n’y rentrais pas. Si je craignais vraiment pour ma vie à pied, j’aurais pris un taxi. Comment peut-on « faire attention à soi ? » De quelle attention s’agit-il ?
– Ne prends pas froid… Prends garde à ci, prends garde à ça…
Inquiets de nature les parents protecteurs ne disent-ils pas à leurs enfants de faire attention ?
– Sur la route ne roule pas trop vite, surtout si tu as bu, d’autant que ta bagnole n’est pas toute neuve et les freins en mauvais état, alors prends ton temps…
Et depuis trois mois maintenant ce fameux:
– Attention au Covid…
Hein? Je vois ce que tu veux dire, mais c’est tout ce que je peux faire, car comment se méfier de l’invisible? Autant que tous les autres virus, celui-ci n’apparaît qu’aux yeux des experts aguerris scrutant leur microscope électronique…
On sait bien que certains conseils d’amis sont avant tout des petits mots d’amour mais pas seulement, on vit dans une société de conseils, conseilleurs, « conseillistes spécialistes », conseillers plus ou moins bien intentionnés. Debout en costard ou mieux, en uniforme les mains dans les poches ou posées sur un bureau quand ils sont assis, ils veulent soit disant votre bien, sachant mieux que vous-même ce dont vous avez besoin. Alors ils prennent le micro et vous menacent du pire, et du cata-cataclysme-catastrophique qu’ils pourraient vous permettre d’éviter, si vous (les) payez pour ça. Sauf que les conseilleurs ne sont pas les payeurs !
La vraie, la seule sécurité absolue, vous ne l’aurez qu’une fois enterré, pas avant ! Alors quoi ? Faut-il s’enfermer à double tour dans le coffre de sa paranoïa misanthrope et ne rien faire en position de lotus ? Faites du sport ou du yoga devant votre écran de télé, sans oublier les prières adressées à je ne sais quelle divinité magicienne pour qu’elle intervienne afin que le plafond, le ciel ou un éclair ne vous tombe pas sur la tête.
Repliez-vous sur vous-mêmes, « restez chez vous » c’est ça faire le bien ?
Comment « faire attention? Marcher à reculons pour voir ce qui m’arrive dans le dos, lever le menton ou baisser les yeux pour éviter de tomber dans trou d’égout, se remettre au karaté en dix minutes tutorial accéléré ou demander dans l’urgence un permis de port d’arme.
Quand on me dit de « faire attention », c’est comme « travaille bien à l’école », ou « te fais pas avoir », ça donne bonne conscience à celle ou celui qui en fait le vœu, mais malheureusement ça n’empêchera jamais qu’un inconscient commette une inconscience qu’elle soit téméraire, suicidaire ou causée par l’ignorance.
Ça me fait penser aux supporters dans les matches de boxe qui hurlent depuis les tribunes:
-Ton gauche, le gauche, putain frappe ! Uppercut ! Vaaaazy donne tout!
Comme si le mec qui est en train de se faire cachetonner sur le ring, entendant soudain ce conseil éclairé venu des tribunes, décide illico de changer de tactique for de la révélation que provoquent en lui les vociférations d’un entraîneur anonyme s’époumonant depuis le douzième rang à gauche…
Non, décidément tous généreux et pleins d’empathie qu’ils soient, les bons conseils n’en sont pas!
Je suis monté sur mon scooter, j’ai traversé les nuages de virus et je suis arrivé à destination sans encombres,
La preuve.
Ouf !
CharlElie Couture
Juillet 2020