Vendredi, je suis allé à La fondation La Ruche-Seydoux, au 2, passage Dantzig, où avait lieu le vernissage de l’exposition de Philippe Lagautrière. Ça me faisait bizarre de me retrouver là, où j’étais déjà venu il y a … quarante ans pour y dormir quelques fois, quand mon prof des Beaux-Arts Michel Paré, me laissait les clés de son atelier. La Ruche est un lieu mythique de la peinture d’une certaine époque. Bâti à partir de restes métalliques ayant servi pour l’expo universelle de 1900, comparable au Bateau-Lavoir, l’endroit fut créé pour aider de jeunes artistes sans ressources : Modigliani, Soutine, Chagall, Fernand Léger, Marie Laurencin, Zadkine, Paul Rebeyrolle entre autres célébrités y ont séjourné. Encore aujourd’hui on dénombre une soixantaine d’ateliers. Philippe Lagautrière a trouvé un style, une manière de faire dans les années 80, et il s’y est toujours tenu. Ses peintures sont des poèmes visuels, il fait partie des artistes graphiques qui jouent avec l’image. J’y ai croisé Serge Bloch, et Nicolas Vial, d’autres artistes de la même génération que moi, ou presque. Ayant le dessin comme ultime vecteur avec un style propre à chacun, on raconte un peu tous notre monde en nous inspirant des représentations du monde des autres. Ce même soir Yamée montait en compagnie de Karim Attoumane sur la scène de la Cigale, en première partie du concert de Silly Boy Blue. La salle blindée à craquer, malgré le match de rugby France/Italie. C’était une toute autre génération, celle des X qui se réjouissent du moindre avantage en ces temps particulièrement difficiles. Très vite j’ai reçu pour Yamée, des messages de félicitation qui m’ont rendu heureux … Bien sûr que “c’était vraiment bien ! “Samedi, j‘ai rendu visite à Catherine Wilkennig qui faisait porte ouverte à l’atelier où elle conçoit ses sculptures en porcelaine. Artiste autodidacte, son travail a pris une autre dimension depuis qu’elle crée des sculptures baroques, détournements de madones en porcelaine blanche. On la connaît bien sûr comme actrice, pourtant depuis quelques années, avec ses objets de culte remplis de symboles, elle a trouvé quelque chose de fort et d’intense qui mériterait l’intérêt des collectionneurs. Que c’est difficile de faire admettre la pluridisciplinarité. Déjà le mot est dur à dire/lire, alors quand je parle de multisme les élites me sourient au nez.Dehors par cette belle journée qui n’avait rien de l’automne, il y avait une fête de quartier joyeuse, et les youyous allaient bon train. Quelques heures plus tard dans le désert en Israël, l’attaque planifiée par le Hamas allait transformer en cauchemar une autre fête pacifique. Depuis on n’entend plus parler que de drame et de mort et reviennent les souvenirs du Bataclan… Ça ne finira donc jamais.Dimanche soir, je me suis enfoui dans l’obscurité d’une salle comme on veut se faire raconter une histoire plutôt que de ressasser la sienne. Mais il n’y avait pas la foule des grands soirs au cinéma Silencio de Saint Germain-des-près où l’on projetait en avant-première le film oppressant intitulé « à l’intérieur », premier long métrage réalisé par Vasilis Katsoupis. Un film à suspense psychologique assez vertigineux écrit par Ben Hopkins. Le pitch est simple : un voleur d’Art s’introduit dans un luxueux penthouse à New York, mais le système de sécurité se met en marche, et l’homme se retrouve coincé, seul, piégé dans ce grand endroit. Lentement il va perdre son emprise sur la réalité, et nous entraîner dans son délire à l’intérieur de l’intérieur…Même s’il aurait gagné à perdre un quart d’heure, (péché de jeunesse du réalisateur qui prend tellement de plaisir à filmer son acteur, qu’il ne veut pas lui, que ça s’arrête. Néanmoins ce film virtuose est une fable Kafkaïenne autour de la question du confinement, interprétée par un Willem Dafoe au sommet de son jeu. Seul en scène ou presque du début à la fin, depuis l’ordre jusqu’au chaos, l’homme gardera toujours l’espoir d’atteindre l’ultime lumière, celle de la Liberté. CharlElie COUTURE