Vendredi dernier nous avons reçu un mail laconique de la compagnie British Airways qui annonçait sans ambages que le vol Openskies de dimanche était ni plus ni moins supprimé. Ils proposaient généreusement de prendre le prochain vol, sans supplément. Mais comme j’étais déjà tendu sur les horaires, j’ai préféré avancer mon départ d’un jour et prendre le précédent. Du coup, geste commercial, je me retrouve surclassé, allongé à plat dans un avion, ça c’est le luxe !!
Arrivé sans problème, je récupère le gros paquet d’œuvres roulées en vue de l’expo de cet été au Centre d’Art CMDCDM de Perpignan. Même si c’est pénible à trimbaler, c’est quand même plus simple que l’enfer des envois intercontinentaux.
On contourne le marathon de Paris, et j’ai le temps de prendre une douche avant d’aller à une conférence extravagante de Pierre Cleitman dans l’atelier de l’ébéniste sculpteur de trônes Michel Haillard.
Retardé pour avoir allumé l’écran afin de connaître le résultat de la coupe Davis qui se jouait à Nancy, j’arrive du coup un peu à la fin de la conférence. J’ai cependant le temps d’échanger quelques paroles avec la femme de Michel qui revient de Strasbourg où elle est allée faire avec son chien, de l’accompagnement animalier en milieu carcéral. Une manière intelligente de redonner conscience de l’autre à ces gens engeôlés pour avoir commis des actes parfois terribles. Vous pouvez en savoir plus sur le site de l’association EVI’DENCE http://s302971705.siteweb-initial.fr
Lundi.
La journée commence tôt. Briefing avec la maison de disque à propos de la cover de l’album, et de la vidéo qui se prépare. Puis rendez vous chez un tailleur de la Place Saint Sulpice, pour une séance d’essayage de la veste qui doit servir de base à Franck Sorbier qui réalisera le vêtement que je porterai sur scène.
Il fait beau et presque chaud, ça change de New York que j’ai quitté dans les vents encore froids.
Prendre mes affaires en urgence et filer gare Montparnasse direction Quimper où Laurent Méthot me récupère pour une semaine de « résidence » pendant laquelle je dois peindre neuf grands tableaux en vue d’une exposition qui restera au Guilvinec durant tout l’été. C’est avec Laurent et deux autres artistes, que j’avais travaillé pour la réalisation d’une centaine de sculptures présentées à la Factory de Beaucourt, sculptures qui seront au centre de l’expo qui aura lieu à Nancy à la fin de l’année (presque six ans sont écoulés depuis que l’ébauche de cette expo s’est mise en place…)
Aller boire un verre du soir aux Brisants, un bistro qui n’a pas changé de décor depuis les années cinquantes. Plongée dans l’arrière-temps de ce pays bigouden qu’on me précise tout de suite être « plus + » que breton, de même que dans les temps, le plus que parfait n’est pas l’imparfait…
Le TGV ne speed plus après Rennes 4.30 heures pour arriver en ce bout du monde européen. La France est un petit GRAND pays quand on voit le temps qu’il faut pour relier sa capitale à ses limites maritimes.
Mais c’est aussi un grand Grand pays quand on goûte à la diversité de ses cultures régionales dont la spécificité ne peut avoir d’égal pour les élus que la difficulté à gérer lesdits particularismes locaux, si l’on en croit l’histoire des grenouilles dans une brouette évoquée par celui qui reste seul « maître du Centre » après l’annonce du désistement surprise de toutes ses fonctions publiques qu’a faite JL Borloo avant hier. ( Remarque petite parenthèse, je comprends la sage décision de ce grunge de la politique, qui s’est toujours comporté d’une manière un peu hors normes par rapport aux us et coutumes de ses pairs conventionnels. J’imagine qu’il a dû entendre l’appel de sa conscience et je veux bien croire à la peine de ce qu’il peut vivre aujourd’hui, quand il y a moins d’une semaine je me tapais à New York au milieu de la nuit une terrible crise de coliques néphrétiques et que je m’interrogeais sur mon aptitude à venir faire tout ce que j’avais à faire… )
Je pose mes affaires dans l’appartement qui m’accueille dont le propriétaire est un psychiatre qui fait de l’hyper marathon qu’il pratique depuis quinze ans comme une cinquantaine d’autres adeptes en France. Je suis fasciné par ces gens de l’effort extrême.
Il me raconte cette quasi hypnose qui s’opère au bout d’un certain temps, quand les pas s’enchaînent de façon machinale et automatique quand on court très longtemps.
Il me raconte ses entraînements et comment il a préparé une course qu’il va faire dimanche prochain ; une course de … 24 heures à plat autour d’un stade. Il va essayer de faire le plus de tours possible de façon à décrocher une qualification pour d’autres courses comme la traversée de la France en courant.
Je me réveille et que vois-je devant mes fenêtres? La mer, que dis-je l’océan à perte de vue. C’est une vision apocalyptique pour un Lorrain ! Mais les gens d’ici n’ont pas l’air impressionnés LOL d’ailleurs les bateaux de ce premier port de pêche artisanale, sont partis depuis quatre heures du matin pour être sur place au lever du jour.
En tout cas les produits de ladite mer-océane ont une saveur sans pareil, si j’en crois le délicieux bar à peine sorti de son milieu aquatique et qui s’est retrouvé hier soir dans mon assiette après un passage au four dans une croûte de sel…
Fait ô combien exceptionnel, contrairement à ce que les météorologues annoncent sans réfléchir à longueur d’année avec une lassante monotonie: il fait étrangement beau, « ciel bleu et vent calme ce matin ».
® CharlElie – Avril 20XIV
PS : Petite correction au paragraphe précédent: le temps de faire chauffer l’eau de mon thé, contrairement à l’optimisme naïf qui m’avait envahi, afin de retomber dans les normes d’un climat ancestral, ayant décidé de façon téméraire de sortir nu sur le balcon sans vis à vis pour ouvrir les derniers volets, au risque de ne choquer que la pudeur des mouettes, tel un énorme dirigeable, un gros cumulus s’est déplacé et stabilisé juste au-dessus de l’endroit où je reste. Du coup une fine bruine froide envahit l’atmosphère. A nouveau le niveau de lumière est retombé d’une dizaine de lumens. Je dis cela pour rassurer mes amis bretons qui sont là-bas à New York de l’autre côté de l’horizon.
Allez, me voilà parti découvrir les toiles auxquelles je vais m’attaquer,
mais ça c’est une autre histoire…