Après ? Bein… Après, rien. Après, c’est juste après. Après, c’est trop tard. Abasourdis, stupéfaits, ébahis, on jette des regards hagards vers l’au-delà en espérant une réponse, mais la réponse ne vient pas. Éperdus, ahuris, écœurés, hébétés. Après, on reste sans voix. L’après est toujours muet. Après c’est juste après…
Les dernières fumeroles et poussières montent au ciel et avec elles s’envolent tous les souvenirs de l’Histoire disparue. On regarde les décombres et il faut faire avec le vide, ce vide qui nous hante, comme un espace absolu, le néant… Après avoir séché nos larmes, on se retrouve face à l’évidence, on est après. Après, c’est trop tard.
Il s’est passé quelque chose de grave. On se réveille avec la gueule de bois, bois brûlé, la gueule en cendre… Au-delà des différences et des particularismes, le monde prend conscience qu’il a perdu un phare, une balise. Chercher d’autres points d’ancrage. Toute la journée, comme une roue désaxée. On vagabonde en errance, de geste en geste, de tâche en tâche. Schizophrènes. Sans repère.
Alors on veut conjurer le sort, on voudrait intervenir. Faire des prières. Remonter le temps. On s’imagine juste avant. On se dit « si seulement». On se persuade qu’une alarme ou quelqu’un aurait pu éviter ça. Avant que toute cette furie ne se déclenche. Flashback, reconstituer la scène, on retourne en pensée sur les lieux du « crime », dans la forêt, là où tout a commencé. Mais on se demande aussi comment est-ce possible ? Qu’est-ce qui a déclenché ça ? En même temps que le gémissement de tristesse, avant que la rage et la colère ne se fassent entendre, on s’interroge. La fatalité a bon dos, il n’y a pas de fatalité. L’argument de la fatalité est une échappatoire pour éviter de s’alourdir avec des cas de conscience. On veut trouver la cause du malheur. Même s’il existe un certain contexte, un terrain favorable, une suite de circonstances qui expliquent l’enchaînement des séquences dramatiques ayant abouti à ce que l’effet se propage en série, néanmoins il y a toujours un élément provocateur à un moment donné…
Pour toute forme de cataclysme, de désastre entraînant la peine et la désolation ainsi que la ruine de certains, oui chaque fois c’est la même chose, à un moment, il a suffi d’une étincelle, une première étincelle.
Intention malveillante ou incompétence accidentelle, à un certain moment, quelqu’un ou quelque chose a mis le feu (… aux poudres?) et personne n’a été capable d’empêcher la propagation du Mal.
Quoi qu’il en soit, il faudra en passer par les constats et mesures d’experts, les batailles de chiffres, les estimations contradictoires entre ingénieurs, les mensonges et faux arguments, enquêtes judiciaires et perquisitions.
(-Entre parenthèses, si les officiels admettent ne pas savoir comment le feu s’est déclenché, alors comment peuvent ils affirmer dans le même temps avec un aplomb non fondu, qu’il s’agit d’un accident ? – Sont-ils au courant d’informations qu’ils ne livrent pas ? )
Même si l’origine n’est pas identifiée, il y a bien un moment, au tout début, où quelque chose a merdé… Quelque chose a été faite (ou n’a justement PAS été faite) qui a entraîné l’irréparable avalanche d’embrasements de la catastrophe d’aujourd’hui…
Qui qu’il(s) soi(en)t, c’est normal de chercher le(s) responsable(s) d’une tragédie. Ne serait-ce que pour se rassurer. Le Diable n’existe pas, ou plutôt le Diable a toujours un nom souvent celui de la connerie.
Alors après, oui après, on en tirera les conséquences et les dirigeants prendront des mesures. À cause d’un crétin / incapable / négligeant / maladroit qui n’a pas assuré, on augmentera les dispositifs de sécurité pour tous, le lobby des assurances énervées fera voter des lois, et des milliers de gens paieront pour… Avec l’espoir que ça ne se reproduise plus.
Quoi qu’il en soit, et même avant d’avoir toutes les réponses, il faudra planifier la reconstruction, et réparer ce qui peut l’être grâce entre autres aux apports bienvenus des généreux donateurs (…) qui se sont tout de suite fait connaître…
Sauf qu’après, ce ne sera plus jamais comme avant !!!
Une fois encore les pompiers ont été héroïques, et dans ce cas précis, il n’y pas eu de victime, alors on se console comme on peut, et on se dit que vu le brasier c’est heureux.
Comme les légendes sont vivantes, certains bâtiments sont vivants,
Notre Dame de Paris est toujours debout,
Toujours vivante!
CharlElie COUTURE
Mardi 16 Avril 2019