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Confesse Book

253 – Joyeuses Pâques

Puisqu’on ne fait qu’interpréter le monde, puisqu’on on ne cesse de donner un avis sur ce qui nous entoure, on vit toujours dans le mensonge. C’est un mensonge diplomatique, un mensonge politique bipolaire.
Soit on exagère le drame qui menace, soit on refuse d’affronter la réalité et l’on se berce d’illusions…
Dans le premier cas, le mensonge négatif vous attire vers le drame et le chaos. Les catastrophistes qui en sont les apôtres se plaisent à entraîner vos humeurs dans la profondeur des gouffres de la dépression qui est en eux. Ils disent : « Gare à demain » quand le ciel est bleu, ou bien : « On va l’ payer ! » quand tout va bien, « Et ça ne fait que commencer… Ça va être terrible ! » Les diffuseurs de mauvais augure se réjouissent d’ombre et de noirceur. Ils se disent réalistes mais en fait, ils veulent te soumettre à l’Ordre.
De façon pernicieuse, certains médias appuient aussi là où ça fait mal. Ils amplifient le drame et déclenchent des conflits sous prétexte de « faire réagir »…
Mes parents étaient un peu comme ça. Ils semblaient redouter le bonheur. Ce bonheur qui s’était refusé à eux qui avaient connu la guerre, la torture et les souffrances. Ils n’avaient confiance en personne et savaient qu’à tout moment tout peut changer. Les séquences de joie étaient de courte durée. Ils se voulaient sceptiques. Ils se méfiaient de la réussite, considérant que le bonheur est éphémère puisque de toute façon, on connaît l’issue fatale de notre existence…
Plus on y croyait, plus on risquait de tomber de haut !
Je répondais : « Alors ça veut dire que même quand tu gagnes une course, un prix, un trophée, quand tu accomplis une œuvre, un exploit, quand tu réussis un challenge ou qu’on te donne un bonbon, tu dois craindre qu’il ne soit au poivre et que la carotte qui fait avancer l’âne ne soit qu’un toy en plastique. Jamais content, jamais, jamais.
Alors t’ arrives au bout du chemin, habité par le sentiment du rien.
Ce que tu as accompli, c’est quoi ? Presque rien.
Et même ce presque rien, c’est comme rien…
Il n’y avait que les imbéciles heureux. Content, tant con.
Cela dit on peut aussi fonctionner comme ça, la crainte n’empêche pas de faire, juste qu’on est dans une sphère de Peur, la boule au ventre, et la menace du jugement divin… Cela dit la peur peut aussi être un moteur, et de grandes choses ont été faites comme ça, c’est simplement assez inconfortable…

Alors pour compenser, cette négativité voici mesdames, messieurs, voici le clan des « autres » grands menteurs. Les menteurs de lumière ! Les joyeux menteurs ! Ceux qui rient de rien et nient l’évidence. Les super-naïfs-exprès, les cupides! Les Pierrots jouisseurs ou les Arlequins de la mode et des fiestas en boîte de nuits! Les patineurs baratineurs et enfonceurs de portes ouvertes, les blagueurs en toutes circonstances et si tu rigoles pas c’est qu’t’es trissst’, les faux enfants nés dans un stéréotype de la mythologie Disney, les ados mythos et les camelots prêts à te fourguer n’importe quoi, les utopistes ZADistes qui veulent prendre les messies pour des lanternes, les candidats de jeux télé ou les défoncés de loterie « siii, j’te l’dis, j’aurai d’la chance, ben koi? Et pourquoi qu’ j’aurais pas l’bon numéro ? », les semeurs de roubles et les animateurs flagorneurs, les prêcheurs au lancer, les bonnes-intentionistes et les illusionnistes, ceux qui vivent sur le tapis volant de leur fantaisie, qui traversent les nuages au-dessus des contingences, comme un mirage en lévitation sur une onde de bonne foi… Ceux-là veulent forcer le destin. « Je vais bien tout va bien ! ». Ils répètent leur délire « positif » convaincus par les arguments d’« En Marche ».
Les conflits internes entre les communautés sont les mêmes et l’antisémitisme sous-jacent, les disparités continuent de grandir, la commission Européenne autorise Bayer à racheter Monsanto, les compressions de personnel sont les mêmes, les impôts augmentent encore tandis que l’Art et la culture sont plus que jamais les parents pauvres du budget, mais comme si la consommation de cannabis avait été libéralisée et que tout le monde plane au THC, on affirme haut et fort que : « Ça y est, c’est la reprise ! », « la croissance doit être revue à la hausse », « l’économie est repartie », « les investisseurs investissent et les industriels embauchent », si seulement…
Mais soyons honnêtes, après un quinquennat de « misère, misère ! » en statu quo et compression, même si les chiffres servent de confettis, il faut reconnaître que l’atmosphère se détend un peu entre les strates de bernés de la classe moyenne, qui s’auto-persuade qu’il se passe enfin quelque chose.
Qu’y a-t il de « vraiment vrai » là dedans ?
Après tout peu importe, quelle importance ?

Trouver des œufs en chocolat c’est aussi une illusion, et même si tout le monde sait que les paraboles bibliques ne sont qu’un tissu de symboles, on peut imaginer qu’on aura tous un jour ou l’autre à traverser une « mer »
pour se retrouver quelque part
avec ses pairs.
Joyeuses Pâques à tous !
CharlElie
20XVIII