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Confesse Book

251 – Hôtel étrange

Ambiance étrange au lendemain d’une nuit très bizarre dans un de ces hôtels neufs de la périphérie parisienne à quelques encablures des parcs de loisirs, à Montevrain plus exactement. Hors du temps. Il fait beau dehors et pourtant c’est comme si je ne reconnaissais pas ce bleu. Une image parfaite dans dessin animé façon Disney version fantastique. Ça a l’air beau mais on dirait que tout est faux. Un décor de cinéma. Ces énormes structures d’hébergement sont des concepts immobiliers pour public en masse. Ça ressemble surtout à de grands paquebots à quai, vides qui attendent la marchandise, mais en dehors des périodes de vacances, même si quelques voitures sont garées sur le parking, c’est désert. Apparemment…

Les concerts SOLO+ démarrent en fin de semaine. J’ai répété hier avec Karim et l’équipe sur la scène d’un théâtre mis à notre disposition pour faire les réglages en 3D, taille réelle. Une générale en quelque sorte. Comme je n’avais pas envie de perdre du temps dans les embouteillages, sachant qu’on a fini tard et qu’on reprend tôt, sachant que des grèves « à la française » créeront demain de méchantes perturbations – la fameuse technique « faire chier les uns pour se faire entendre des autres… » (C’est le principe !)- Du coup, j’ai préféré rester sur place. Sauf que j’étais le seul à choisir cette option.

Après le « bruit » des repets je me suis retrouvé dans une sorte de néant. Un absolu no where, no man’s land.

À la réception, le type, aimable par ailleurs parlait en grommelant dans un accent bizarre. Je n’arrivais pas à savoir s’il était Kirghiz ou Portugais, ou Chilien, Slovène, ou Hollandais, mais à part lui (qui en incarnait plusieurs), il n’y avait personne, à peine une ombre furtive dans un reflet.

J’ai posé mes affaires chambre 425, et je suis redescendu car le « gardien du temple » m’avait dit que je pouvais manger au bar. Les tables du grand restaurant qui s’étalait sur 200 m2 ne servant que pour le petit déj’, pour la restauration, il fallait passer commande à partir de trois brochures imprimées (menu « Italien » pizzas, « Japonais » sushis, ou « à la française » poulet frites) qui renvoient chacun à la même adresse. Donc la même cuisine… « Non monsieur, rien sur place », me dit le barman lui aussi venu d’ailleurs.

J’ai bu un verre, puis un autre en attendant qu’arrive ma salade.

Je poireautais depuis ¾ d’heure sous les grands écrans télé qui diffusaient en boucle les mêmes infos en continu quand soudain, le grand hall s’est rempli de voyageurs venus d’Asie. D’un seul coup il y a eu cent ou deux cents personnes avec des valises qui faisaient un bruit énorme. Une interprète leur a distribué les cartes magnétiques de leurs chambres et à nouveau le grand silence.

Un jeune couple est passé rechercher des forces. Le mec a commandé une pizza (je pense qu’il l’attend toujours). Et puis un groupe d’hommes costauds se sont installés. Ils ont commencé à boire des bières et une autre, et encore une, t’en veux une Titi?. Ils évoquaient les problèmes liés aux nouvelles directives du gouvernement. Le ton est monté, le barman les a invité à sortir. Ils sont ressortis. Juste venus boire des coups apparemment.

Finalement, même en sirotant ce Chardonnay tout doucement, j’avais bien entamé la bouteille que le barman vidait pour me faire patienter quand enfin la « salade du pêcheur » est arrivée. Pauvreu pêcheur, de salade oui, juste accompagnée de deux tubes de vinaigrette en sachets conditionnés. 1 heure et quart pour ça ?

Je m’apprêtais à remonter dans ma chambre quand l’un des deux hommes à la barbe courte bien taillée qui venaient d’arriver, m’a fait un petit signe interrogatif. Pas besoin de savoir ce qu’il me demandait, j’ai répondu « oui ». Sous entendu « C’est vous ? Qu’est ce que vous faites là, tout seul ? » Alors comme la discussion peut être une distraction, on a échangé quelques propos. Et j’ai appris qu’ils étaient CRS venus en escadron du Sud de la France et logés là en amont des manifestations qui auront lieu dans la capitale demain… J’ai repensé en m’amusant aux syndicalistes venus et repartis 20 minutes avant.

La télé s’allumait automatiquement quand on mettait la carte dans la fente électrique. Une chaîne improbable diffusait un programme obsessionnel inquiétant sur la présence parmi nous des extra terrestres. Pourtant aucun doute, – et je ne dis pas ça parce que je suis « man in Black », habillé en noir – pas besoin d’aller chercher bien loin, je te confirme qu’ILS sont en effet déjà parmi nous, d’ailleurs je crois que j’ai dormi cette nuit dans un de leurs repères…

 

Mars 20XVII