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211 – Ce qui nous lie

Comme beaucoup de réalisateurs Français, Cédric Klapisch mélange les genres sans complexe ; pourtant quoi qu’il fasse, il conserve une écriture cinématographique libre, proche d’une réalité à la fois simple et nouée. S’inspire-t il majoritairement des comportements de jeunes gens, qu’il raconte le quotidien comme une aventure. La dernière en date s’intitule « Ce qui nous lie ». Le tournage de cette comédie dramatique s’est étalé sur une année. Au fil des saisons, il évoque les choix que doivent faire deux frères et leur sœur, héritiers d’un vignoble en Bourgogne, et comment naît l’attachement à la terre.

Encore un film sur le vin ? Peut-être mais pas seulement, s’il fait battre le pouls des régions viti-vinicoles, le vin est loin d’être l’unique argument du film. Plus connu pour choisir des urbanités en guise de décor, Klapisch est donc venu cette fois enfoncer les trépieds de ses caméras dans la terre des Meursault. Mais qu’on ne s’y trompe pas, même s’il y a le nombre qu’il faut de plans serrés pour être crédible, le film n’est pas pour autant un documentaire «folk». Bien que filmée avec un certain attachement, la Bourgogne n’est finalement qu’un prétexte, car cette comédie familiale a quelque chose d’universel, qui dépasse les anecdotes au jour le jour. L’histoire est autant celle de la responsabilité d’un héritage, que celle des décisions à prendre pour construire sa vie.

Champ / contre-champ dans les travées des appellations burgondes, comme de couplet en refrain, Cédric Klapisch qui a souvent travaillé avec la même équipe, a cette fois-ci changé de « musiciens », cette fois-ci les premiers rôles s’appellent : Ana Girardot, Pio Marmaï et François Civil. Leur spontanéité et leur naturel donnent à cette histoire, un caractère touchant de vérité. (Je ne peux omettre de signaler aussi à plaisir la présence à l’écran de ma fille Yamée, dont la prestation à leur côté me donne clairement envie de la revoir bientôt).

Au passage coup de chapeau à la musique de Loïk Dury, qui une fois encore trouve une grande complicité avec son metteur en scène. Entre son et image. Oui, Cédric Klapisch sait raconter des histoires, à l’évidence il n’a pas l’ambition de défier les grandes harmonies du « Sacre du printemps » ou des « Quatre saisons », pour autant cette composition bucolique intime fait penser à un concerto d’automne, une musique pour orchestre de chambre, chambré comme un vin à température ambiante. (Je dois convenir, que tenté par l’évocation de ses arômes, j’aurais rêvé de goûter la fameuse cuvée dont parle le film).

On peut aimer le vin, sans pour autant vider le tonneau jusqu’à se retrouver déguisé en Bacchus barbu complétement pété en se tenant la grappe sur un nuage entouré de nymphes rubicondes et de plantureuses danseuses burlesques, lors de fêtes dionysiaques,

Je veux dire, on peut aimer le jus de la treille pour sa finesse et sa complexité, On peut aussi aimer le plaisir indiscutable que procure l’ivresse de voir le monde pour ce qu’il est… Les poètes ne disent- ils pas que la vérité sort des verres ?

 

Qu’on le hume ou qu’on le grume, qu’on le sirote ou qu’on le lampe, de gorgée en gorgée, « boire un bon vin » c’est un peu comme « voir un bon film ».

 

Juin 2017