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Confesse Book

172 – Black Friday

En ce jour de « Black Friday »…
Ce jour de folie inventé pour écouler les fins de stock, et pousser à la consommation au lendemain de repas Pantagruéliques à base de dindes de 9 kilos farcies de marrons, de pain de mie plus un peu de viande de porc et du marshmallow,
Ce jour qui veut que certains magasins aient ouvert leurs portes en verre à trois heures du matin, et des gens faisaient la queue déjà hier soir, avec leur chaise pliante sur le trottoir, pour être les premiers,
En ce jour qui, chaque année, fait un ou deux morts piétinés ou étouffés par une foule en délire qui se précipite à l’ouverture, dans une sorte d’hystérie compulsive pour être là et avoir plus de choix, une foule qui va se ruer sur des soldes à 50%, 60 ou 80%, et qui tel un troupeau de buffles passant sur un champ de coquelicots ne laissera en fin de soirée que quelques pétales rouges dans des boutiques quasi dévastées avec des habits en vrac ou jonchant le sol…
Intéressant de voir que d’autres pays optent pour un autre rapport au bonheur…

Quand j’étais jeune, on se devait d’aller « faire réparer » les objets mécaniques. C’était un devoir. Et a fortiori ceux qu’on aimait bien, qu’on utilisait souvent mais qui tombaient en panne. Et puis on s’est entendu dire que la société avait changé. Que la nouveauté, le progrès de la technologie faisaient que le nouveau smartphone était mille fois mieux que le précédent, alors on s’est laissé avoir et convaincre qu’acheter un neuf était finalement mieux que de continuer à utiliser l’ancien.
Qu’il s’agisse d’un garagiste ou d »électronique, on s’est aussi entendu répéter à l’envi que « ça coûtera plus cher à faire réparer que d’en acheter la nouvelle version. « Celui-ci ne se fait plus, il est vieux il a au moins deux ans… »
À force de voir disparaitre pour cause de manque de mains d’œuvre, de charges trop lourdes, de complications administratives et autre RSI écrasant les artisans et petits commerces au profit des grandes enseignes, à force de voir disparaître dis-je ces échoppes et lieux improbables où s’entassaient des tonnes d’objets disparates, d’où émergeait un cinquantenaire en blouse grise qui, soulevant ses lunettes d’un air un peu ahuri, un fer à souder dans l’autre main vous demandait : « Oui, c’est pourquoi? » et vous, gêné présentiez ledit tourne-disque en bredouillant: « il ne marche plus », et lui, sans même regarder de quoi il s’agissait vous disait de revenir la semaine prochaine ou dans quinze jours selon la pièce qui manquait…
Oui, à force d’entendre des vendeurs en p’tit costard à la con, d’une voix de soap comédie vous dire en prenant l’air concerné: « Mhhh… On va d’abord vous faire un diagnostique, ensuite on vous enverra un devis et si vous l’acceptez, on va le renvoyer à l’usine pour analyser les composants vous avez la garantie? Oh, ça prendra bien trois mois…  Par contre celui-ci est disponible, j’en ai 20 en magasin… »
Alors comme tout le monde, moi aussi j’ai pris l’habitude de jeter des choses à regret, comme ce « earphone » balancé ce matin. Oui, c’est seulement une soudure qui a lâché, mais je n’ai pas le matériel qu’il faut pour refaire ce minuscule point de jonction et qui, dans mon périmètre saurait le faire? Personne.
Alors comme beaucoup tant d’autres je vais profiter de « Black Frida-y « .

® CharlElie C. – Nyc  Nov 20XVI