Aujourd’hui au milieu de la grande confusion, le langage se veut efficace, net et précis.
Mais pour moi cette mécanique rationnelle technocratique, ça ne marche. Entouré par les traînées fantômes de discours itératifs qu’on vous repasse à longueur de journée, soli de communicants qui diffusent des messages moulés à propos du Pouvoir, à propos du sang, du sexe, de la santé ou à propos de fortunes bonnes ou mauvaises, moi je m’invente d’autres issues. En fait, je n’y peux rien. Ça rentre « sens » par une oreille, et « son » par l’autre. Ça se fait tout seul, une distorsion, comme lorsque vous mettez de la pâte dans une machine et qu’il en ressort des coquillettes, des cannelloni, des spaghetti ou linguine. Comme un « rubik-cubiste » fait tourner dans ses mains les couleurs, j’entends des mots sans raison.
Ça n’a pas de sens, et alors ? N’y a-t il donc que les polémiques qui soient amusantes pour l’esprit ? Jeu du je, à tu et à toi, sur une île sans elle, à genou j’avoue, (Eels in Hells), diphtongues croissantes ou hiatus, métaphores, allégories ou paraboles, figures de style ou mots croisés, tordus, mots valises, rythmés ou musicaux, le son des mots tourne dans ma tête quand on me parle, et tout autant quand on ne me dit rien d’ailleurs.
Être fun, comme « porte et fenêtre »; une manière de s’aérer l’esprit embrumé par tant de propos âcres et fumeux. Juste comme ça, voici ceux qui me sont venus ce matin, (certains ressemblent presque à des titres de LIBÉ).
Jeux de mots inutiles
en CAPITALES.
T’es homeless, TÉHÉRAN, t’es nu, ABOU DABI,
Tu mises à PARIs, tu achètes à DUBAï,
En tout cas, tard (ou tôt), tu paies c’ que tu DOHA,
Si SARAJEVO, pas cher, plus d’un s’est fait avoir à BERNE,
S’il y a « jambes », BRASilia aussi,
T’as ralenti à OSLO et dix à ATHÈNES (bilingues),
9 à ADDIS-ABEBA (et à dix y a débat),
Tu bois du blanc à DUBLIN, t’es bourré à SEOUL,
Tu te réveilles à ANDORRE, mais tu blagues à la HAVANE.
Chassé de KINSHASA, les réfugiés VIENNE en Autriche,
Contre SINGAPOUR, et d’accord à DAKAR,
BUENOS AIRES de courir, il faut partir à point,
Si la drogue est partie, KAMPALA,
Un père pris la main dans le sac, c’est BAGDAD,
Bien élevé à TRIPOLI,
Le miracle Allemand, c’est BERLIN l’enchanteur.
Etc.
Un de mes oncles, par ailleurs ingénieur, inspiré par Pierre Dac, par la pataphysique ou le parti d’en rire, vingt fois nous ressortait souvent sa blague «le taxi ralenti parce que le taciturne », bon ça me faisait pas rire, mais quand j’étais gamin, je ne comprenais surtout pas pourquoi il s’excusait ensuite. Pourquoi donc fallait-il s’excuser de n’avoir pas entendu les mots pour ce qu’ils disent ? Faut-il demander toujours pardon de ne pas penser comme tout le monde et/ou jouer sur les mots?
J’en connais tant de ces tribuns politiques ambitieux arrogants, de ces écrivains présomptueux ou idoles niaiseuses, et autres journalistes aussi vaniteux que cyniques qui balancent des âneries bien pires que ces calembredaines homophoniques, calembours paronymiques, bigrammes, boutades, et autres jeux de mots dits « pourris », devant les caméras de la France entière, au journal de 20h, ou là où « Tout le monde en Parle », sur des radios d’états, ou au micro des Nations-Unies, sans jamais chercher la moindre excuse…
Pourquoi faut-il s’excuser de jouer sur le mal dur, ou les maux doux,
Démon des mots émerveillés par mots et par « vont », par monts et par vaux devil en ville.
® CharlElie – Oct 20XV
PS : En passant, le terme de poësie s’écrivait jadis avec un tréma, il signifiait « faire », « créer ».
Chez les grecs le poète n’est pas un contemplatif, mais un créateur, un inventeur de formes expressives.